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du noir, du cyan, du jaune et puis du magenta

Le son des Têtes raides, un condamné à mort, La peste ou l’ETrangere, cherchez l’erreur, ma voix de l’écrit me condamne à la léproserie de ma voix sonore.

J’en connais une, de léproserie, celle d’Asinara, juste à côté des quartiers de haute sécurité, quand j’allais avec eux, les savants de Barcelone et ceux de Sardaigne, colloquer au sommet du fin fond d’une île-prison. On dit chef de projet, cheffe j’étais, cheffe de rien, je m’occupais des papiers, eux s’occupaient de l’identité des espèces, éviter la disparition, ressusciter les oiseaux rares.

Et on avait l’honneur de déjeuner dans la petite maison, où le cuisinier prisonnier nous faisait à manger le porc cuit au sel, le fromage aux vers blancs, de ceux qui s’échappent de la bouche. Tout ce monde riait lourd, quand les officiels de Tanger s’éloignaient écœurés. Petite bibliothèque aussi, envahie d’essais sur la sexualité, le porno est interdit dans cette prison d’Italie.

Cherchons les phoques-moines, disait le grand Pêcheur, et tout ce beau monde de hanter l’île solitaire, nue de touristes depuis qu’il existe des paquebots, des croisières et des nomades à tickets, bleus lagons, eau transparente, ici virginité côtoie le crime organisé.

On dit « cyan » pour décrire, entre vert et bleu, un rayonnement dont on a fait les dômes d’Asie centrale, la médersa Tilla-Qari, une couleur qui a envahi les encreurs de nos imprimantes, mais n’est pas dans la décomposition de l’arc-en-ciel ou cachée. Le cyan est un bleu clair, du grec Kuanos, qui désignait nous dit le dictionnaire un minerai bleu utilisé dans la Grèce antique pour la teinture des vêtements. Le minerai s’appelait azurite.

Dans l’Encyclopédie Diderot et d’Alembert, on ne connaît que le bluet ou barbeau pour évoquer le cyan.

BLUET ou BARBEAU, s. m. cyanus, (Hist. nat. bot.) genre de plante dont la fleur est composée de deux sortes de fleurons. Ceux qui occupent le centre de la fleur sont plus petits, découpés en lanieres égales. Ceux qui sont à la circonférence sont beaucoup plus grands & plus apparens ; ils semblent être partagés en deux levres. Les uns & les autres portent sur des embryons de graines, & sont soûtenus par un calice écailleux qui n’a point de piquans. Lorsque la fleur est passée, les embryons deviennent des semences garnies d’aigrettes. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez Plantb. (I)

Que n’ont-ils demandé l’Encyclopédie, les prisonniers de l’île.

Il a de grandes vertus le bluet. Je me le suis appliqué ce soir. Voici la recette de l’excellent ophtalmique que l’Encyclopédie a posé sur mes yeux.

L’huile de bluet se fait de la façon suivante. Prenez des fleurs de bluet cueillies avant le lever du soleil, autant qu’il vous plaira ; pilez - les dans un mortier de marbre ; renfermez - les dans un vaisseau de verre dont l’ouverture soit fort large ; fermez exactement ce vaisseau, & l’exposez au soleil pendant un mois entier : on peut luter ce vaisseau avec du levain.

Lute, lute, ce vaisseau, ajoutes-y du levain, si tu veux, prends une certaine quantité de fleurs de « bluet » avec leur calice, broie-les. Et tiens fais-moi macérer pendant vingt-quatre heures dans une suffisante quantité d’eau de neige, distille-moi ensuite à un feu de sable modéré, l’eau que les François appellent « eau de casse-lunette », la belle affaire, j’y suis toute à l’eau de bluet.

On assûre que cette eau & celle d’eufraise sont un excellent remede contre l’inflammation des yeux ; & on la recommande avec le musc, le benjoin, & la fleur d’orange, pour donner au visage un teint fleuri, sur - tout si l’on y ajoûte le lait virginal.

Le corps de ce siècle transpirait par toutes ses odeurs, on n’avait pas peur des mots et des sensations qu’ils évoquent, je voudrais cela dans mes textes, le lent envahissement des sens, le sexe des mots.

Tournefort conseille l’eau de casse - lunette dans les ophthalmies avec rougeur, dans la chassie, & toutes les fois qu’il est question d’éclaircir la vûe & de la fortifier, avec une quantite suffisante de camphre & de safran, lorsqu’il s’agira de calmer une inflammation. (N).

Il s’agira de calmer une inflammation par des conversations de fraise, d’humaine tranquillité, pas secouée, juste que là je devienne enfin autre femme que muette à points de suspension. Soyons prudente.

Sur l’île face au Port de Torrès, quand je contemplais fascinée les plages de velours jaune, tentée de m’y étendre, un garde armé me suivait, les prisonniers du paysage erraient leurs yeux sur moi, plaisir interdit, moi consciente des regards, pas possible le bain. Un peu comme dans le carré des sortilèges. Condamnée.

Condamnée ? Genet in Le condamné à mort :

Ô viens mon ciel de rose, ô ma corbeille blonde !
Visite dans sa nuit ton condamné à mort.
Arrache-toi la chair, tue, escalade, mords,
Mais viens ! Pose ta joue contre ma tête ronde.

Double jeu, double sens, double genre. Bien posé là, dans les images troubles des sphères d’outre-tombe. Ces mots qui visent au corps.

Et de redire le mordre, l’Encyclopédie :

Mordre, teinture, terme de Chapelier - Teinturier, qui signifie prendre la couleur plus ou moins vîte. Il y a des étoffes ou feutres qui mordent facilement la teinture, & d’autres qui la mordent très - malaisément.

Moi toute à la morsure d’avoir laissé sur ce blog de quoi tendre le flanc. Je ne voulais pourtant qu’une chose m’apprendre qui était Je, le cultiver, je ne cherchais pas mon nombril, j’avais juste besoin de m’entendre penser, pas des moi, non, un sujet, le S supposé savoir, enfin, je crois, depuis Nathalie, tout fait soupçon, mais s’autoriser de penser ce que vit, ce qu’il aime, ce qu’il n’aime pas, ce Je asmathique, pas fini.

Un peu comme dans cette bluette, non pas l’autre, un film de peu, juste une scène, il lui a dit : Et vous les œufs, vous les aimez comment le dimanche matin. Et elle s’est rendu compte qu’elle ne le savait pas, qu’elle avait toujours cuisiné les œufs pour ses amants, se mettant à leurs goûts. Et elle, comment elle les aime les œufs ? Alors elle en a gobé un, tout cru, puis a testé le cuit, de toutes les manières, elle en a rempli des assiettes, des au plat, brouillé ou en omelette, dur ou mollet, sauce gribiche, mimosa, finalement elle a su comment elle les préfère, mais ne nous le dit pas.

Et bien moi, c’est pareil, je viens chaque jour pour me demander comment j’aime les œufs. Et quand je l’ai écrit, ce texte, c’était aussi pour ne pas me demander comment un homme à l’hôpital aimerait ses œufs quand il sortirait du coma. Il ne me l’a pas dit.

Quand on parle du cyan, on parle aussi du jaune et puis du Magenta. Certains le nomment fuchsia mais à tort, longtemps mon préféré, un mélange de lumières, le filtre magenta ne laisse passer que le bleu et le rouge, en synthèse soustractive, presque pas une couleur comme le noir et le blanc.

De Magenta, cette ville d’Italie, le magenta provient de l’aniline, obtenue à partir de l’indigo, et retour à l’Encyclopédie et à l’autre infusion.

Violettes teinture & sirop de, Venel (Page 17:316)
La teinture de violettes n’est autre chose qu’une forte infusion à froid dans l’eau, des pétales de violettes bien mondés, sur - tout de leurs calices. Pour avoir cette teinture constamment bleue, & d’un beau bleu, on doit la preparer dans un vaisseau d’étain ; c’est - là le tour de main, arcane qui est pourtant connu aujourd’hui de tous les bons artistes ; & pour se la procurer aussi saturée qu’il est possible, on applique deux ou trois fois sur de nouvelles fleurs, la liqueur colorée par une premiere infusion.

Il faut insister pour l’infusion violette, repasser plusieurs fois sur de nouvelles fleurs. Moi aussi, déjà passée par là et n’aimerais pas que dead end. Ne pas trop repasser svp.

Alors j’ouvre Histoire de Claude Simon

Puis rouvrant les yeux et le soleil rasait le sommet des branches colorait le faîte du mur d’une lumière tendre rosâtre ou plutôt cuivrée. L’oiseau n’était plus là. En haut les briques étaient d’un rouge orange et plus bas, là où il n’arrivait pas encore, mauve lilas, le faisceau convergent de leurs rangées parallèles s’enfuyant aspiré par la perspective vers un point imaginaire au-delà du mur en face, du lierre toujours dans l’ombre, bleu foncé.

L’oiseau n’était plus là, celui d’il y a longtemps a disparu, l’a été remplacé par un autre, mais tant d’incertitude. Et je rouvre les yeux, qui ne sont pas mauve lilas, et me mets à viser le point imaginaire.

écrit ou proposé par Christine Simon
BY-NC-SA (site sous licence Creative Commons BY-NC-SA)
première mise en ligne le 16 septembre 2014 et dernière modification le lundi 14 mars 2016
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