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cécile duval, porteuse d’écriture comme on dit porteuse d’eau

Rencontré Cécile Duval lors d’une Nuit des musées, il y a plus d’un an, dans la salle des archives de la Commune à Saint-Denis, et presque tout de suite nous avons engagé un dialogue, autour de Lautréamont justement, qu’elle dit depuis plus de dix ans.

N’en avais lu que quelques pages, ça fait partie de ces livres posés sur une étagère, collection Corti, que je savais avoir à lire, vraiment entré dedans en juin de cette année, après qu’elle a donné le spectacle, Les chants de Maldoror, au Théâtre El Clan Destino.

Y suis retournée le 29 septembre, pour entendre le chant troisième, qui devrait à nouveau être programmé le 20 octobre prochain. Si êtes intéressés, joignez sa page Facebook pour connaître les détails de son invitation.

Encore sous l’effet de sa voix, aimerais dire ce que son travail a de si spécial pour moi.


Cécile Duval, porteuse d’écriture comme on dit porteuse d’eau [1]

Dans la silhouette encombrée d’un manteau à carreaux, avec drôle de chapeau sur la tête, l’épaisseur annonce que son corps va porter, avec l’énergie démesurée qu’il faut, l’incroyable histoire d’un cheveu et de son créateur, un monument, pour que l’insensé prenne pied dans la réalité, dans l’espace sonore, entre les murs de ce petit théâtre, qu’il nous soit transmis sans effets de comédien, mais non sans jeu d’acteur, là qu’est le choc.

Les deux fois où entendu le texte dit par elle, s’est communiquée à moi et sans doute aux autres, -au-delà du récit, qui nous rend ce déroulé en syncopes successives d’un narrateur qui regarde par le petit trou de la serrure, d’un créateur qui se laisse aller au pire dans un lupanar, d’un cheveu qui raconte le dol d’être asservi et d’avoir été relégué sur le sol, d’avoir assisté à l’écorchement vif d’un jeune homme, ces enchâssements du récit, paroles de cheveu, de créateur, de Satan, et d’un témoin oculaire de la complainte du cheveu-, au-delà du récit et de ses péripéties, la sensation qu’un autre temps est présent, comme un contexte, un temps de l’écriture, on entend l’auteur dans sa prise avec la langue, ce que le jeu, la voix, le regard font, installe une présence à nous d’un qui écrit, nous le fait ressentir, comme si on entrait dans son intention, là, et dans l’écriture, son jet dans le monde ; Cécile Duval n’interprète pas quelque chose, elle dit le quelque chose pris dans le geste d’écrire. En cela, remarquable, peu entendu auparavant.

Et quand j’évoque ce ressenti plus tard, elle dit sa filiation, Alain Astruc, et son apprentissage d’un travail d’acteur en permanent contact avec le public, une partie à trois, une invite au texte, elle l’apporte dans le dire, elle joue le texte, ses différents niveaux, ses dialogues intérieurs, et chaque fois y incluant le spectateur, créant par l’attention à la présence du public l’attention en retour du public pour la présence de l’écriture, et retrouve là mon ressenti, elle amène le spectateur au flux de l’écriture (« ne pas interpréter une scène, jouer l’écriture » dit Astruc). Cécile Duval parle de ces pièces d’Astruc, où les scènes avancent par le seul truchement des mots, pas d’intrigue, et de l’importance de la présence de l’acteur à les porter dans un dialogue avec le public, sans autre rebondissement narratif qu’un mouvement qui se génère dans la danse entre l’écriture, l’acteur et le public.

Ce savoir transmis à Cécile Duval qui rend compte ainsi et de la puissance imaginaire de l’écriture et de l’existentielle solitude qu’il faut pour l’exprimer, comme en double source de sa nécessité et ce faisant « nous fait voir le poème en train de s’écrire » [2].

Ce que le public rend à Cécile Duval au sortir de la loge, par ces murmures, je vais aller le lire, pour la première fois y ai compris quelque chose, quel texte et quelle langue. Le pari réussi d’un hommage à l’écrire.

Ecouter et voir Alain Astruc

Alain Astruc - Film couleur / Images : Cécile Duval / Montage : Patrice Besnard
1993 / Durée : 1h 53mn

crédit photo Martin Baretta

[1le titre pour moi est un hommage à cette posture d’acteur humble, qui s’efface devant le texte, qui accueille le public dans le jeu d’acteur assurant ainsi une forme d’irrigation du texte.

[2Propos rapporté de Charles Pennequin sur le travail de Cécile Duval

écrit ou proposé par Christine Simon
BY-NC-SA (site sous licence Creative Commons BY-NC-SA)
première mise en ligne le 1er octobre 2014 et dernière modification le dimanche 3 décembre 2017
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